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Une Chambre à soi (sur une photographie de Georges A. Bertrand)

 

georges a. bertrand,Égypte

Ghoraïb (Egypte)

 

De la glace, inexplicablement chue une nuit d'octobre, et mille fois brisée, il a conservé cette ouverture vaguement triangulaire. Ses bords sont coupants. Il lui a trouvé la position la plus pratique. Il ne peut plus désormais envisager son corps qu'en puzzles successifs, sauf en s'approchant au plus près, les deux yeux. Parfois, il se fixe, comme s'il surveillait, à travers un étroit soupirail, un prisonnier qui, de son côté, viendrait à sa rencontre pour lui signifier qu'il est là, oui, bel et bien là.

Quand il se rase, la main et la lame prennent toute la place, avant de s'effacer, emmenant le savon en bandes régulières. Sa joue ne lui a jamais semblé aussi nette.

Un bout de verre. S'il venait à se briser de nouveau, dix ou cent éclats, qu'importe, la vie serait tout à coup plus difficile et ce n'est pas le grand panneau impersonnel du magasin à dix mètres de sa porte qui lui sauverait la mise. Quand il le pourra, il ira chez Hamid acheter une autre glace.

Quel besoin a l'homme de regarder son image inversée (vitre, ondes, surfaces quelconques), fût-ce au dernier souvenir du miroir. Il ne se pose pas la question. Mais en attendant, chaque matin, il salue d'un sourire attendri sa petite et première fenêtre sur le monde.

 

Photo : Georges a. Bertrand

 

 

 

 

 

 

 

 



 

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