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musée thyssen

  • Femme en bleu (VII) Lichtenstein

    Roy Lichtenstein_women_in_bath.jpg

    Roy Lichtenstein, Woman in bath, 1963, Musée Thyssen, Madrid

     

    Foin de Bethsabée au bain, voluptueuse et flamande, ou d'une Marthe agenouillée au tub. Moins encore un cul à la Degas ou l'étrange rêverie que saisit Stevens. Lichtenstein, lui, fait dans le moderne : une femme propre, lisse, hygiénique, made in Procter & Gamble. Elle est légèrement halée, émerge des ondulations et de bulles qui semblent, les bulles, une parure bon marché. Ses dents ont la blancheur du carrelage qui lui sert de décor, et ses traits sont bleus comme les joints du dit carrelage. Elle sourit et l'on évoquerait bien un semblant de sensualité : son rouge à lèvres, son regard vaguement langoureux, sa chevelure enflammée. Mais il y a cette vacuité béate qui traverse tout ce visage, ce corps. Cette impression terrible vient sans doute de ce que l'image projette un temps de comédie privée, une illusion faite à soi-même dans l'intervalle d'un moment d'intimité. Être rayonnante jusque dans le lieu où nul regard ne viendrait alors la surprendre. Lichtenstein explore, par le vernis du spectacle clos, la terreur qu'il y aurait à voir se fracturer l'image sociale.

    On regarde l'éponge, on pense à son inconsistance, à elle, par métonymie. Son inconsistance publicitaire. Et, par ce même sentiment d'imprégnation, on sent que le trait bleu qui sert à unir l'ensemble du tableau, qui en donne en quelque sorte la tonalité, en dépit de toute logique de vraisemblance, est un choix idéal pour suggérer qu'à ce point l'eau (et la salle de bain) est un milieu corrosif, un accélérateur de décomposition et le soin du corps une puissante aliénation.



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