Sois à ce que tu fais. Bien sûr... La question est de savoir dans quelle mesure, jusqu'à quel point. Car il arrive un moment où l'histoire excède la concentration, la qualité requise à la bonne effectuation de la chose, à son accomplissement. Et nous sommes alors, comme un prisonnier, à ce que nous faisons. Il n'est pas question de dire que cela est bien pire que l'esclavage, dûment établi, juridiquement établi, mais il n'y a pas lieu pour autant de s'en réjouir. Soldat famélique d'une cartographie qui nous compte pour peine perdue et miette sèche, nous avançons : nous sommes à la secte, à l'entreprise, à la structure, au groupe, à la communauté, à l'œuvre de bienfaisance, au club, à l'association, aux heures de veille forcée, à la montre, à la pendule, à la pointeuse, à la parole donnée, au craché-juré, à la tâche à finir, au bouclage qui n'attend pas, aux comptes à rendre, au compte rendu pour demain, à la relecture du rapport par quoi tout peut encore tenir, au dernier entraînement assurant la victoire, à la dette, à la promesse, à l'amitié, à l'amour, au dressage du plat pour des invités qu'on ne voudrait pas décevoir, à la énième fois où l'on essaie de se reproduire en oubliant de jouir, au rendez-vous de la garde alternée, aux astreintes même le week end, à la réunion imprévue, à la rectitude de ton corps défilant, à l'ordre, au contre-ordre,...
Sois à ce que tu fais, obtempère, obéis, mime, joue, singe, grime, et tais-toi...
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