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Photolalie

 

 

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Ce sont les ombres que nous aimons aussi. Non pas celles tenaces des perdus et des enfuis, ombres avec lesquelles demeurent un contentieux ou des remords, mais les ombres furtives dont la chevelure argentique et le demi-sourire muet ont déjà traversé la rue, atteint les derniers degrés de l'escalator ou poussé la lourde porte d'un magasin d'exotisme.

Les ombres qui, dès les jours suivants, souvent disparaissent ; mais elles n'ont pas sillonné notre âme en vain, parce qu'elles sont le sédiment d'un éveil inattendu, dans le territoire du commun (il s'agissait de faire une course, de retirer de l'argent, d'attendre le bus). Les ombres finissent par faire corps entre elles, quoique ne se ressemblant pas, on le sait. Elles forment une chaîne qui parle de nous, de ce que nous sommes sans le savoir. Elles sont l'inadvertance de notre histoire. L'in-su. Ce qui est enfoui et surgissant comme jamais altéré, une joie, une jouissance, un rappel à l'ordre du désir.

Les ombres filent et leur silhouette végétale se faufile au milieu de la pierre. 

Celle de ce jour, tu jurerais l'avoir déjà vue, et sans doute est-ce vrai jusque dans l'incertitude car, plus que tout discours, il y a la vibrante harmonie des épaules, la gravité d'un profil et le cil tremblant d'un regard frondeur...

 

Photo : Édouard Boubat

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