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Le reliquat

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"Dans les vieux livres, on cherche notre aventure. On lit par l'ancienne aventure le désarroi d'avoir manqué la nôtre. Les morts sont auprès : mains et voix. On entre dans les maisons, on les revoit tout au bout. Leurs objets à eux, l'invention qu'ils ont connue, et l'ébranlement qui les suivit. On est donc soi-même si vieux, à son tour, pour que l'apparition de la machine à laver, du téléviseur ou des guitares électriques nous soit un événement, quand la valeur symbolique de tout cela à son tour s'est évanouie ? On n'a pas de nostalgie -l'idée d'une mélancolie est plus riche, plus subversive même, à la fois quant au présent et au passé. Dans le chambardement des villes, on a désappris d'accumuler et garder (même si). Reste le présent, et son abîme : faute de le comprendre, et dans l'amplification majeure, chaotique qu'il représente, revenir lire les transitions successives. Il y vos mains, et il y a ce front froid des morts, ceux qui furent vôtres. Au bout, tout au bout, on le sait : rien que les livres. Parce que cela aussi serait en danger, où on a tant appris ? Alors eux aussi les lire dans ce bouleversement des choses. Comment croire que soi-même on provienne d'un tel monde ? Cinquante ans, une paille."

     François Bon, Autobiographie des objets, 2012

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