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defoe

  • Saint John Perse, insulaire

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    Je ne crois pas qu'on lise encore beaucoup Saint John Perse (mais la poésie en général...). Sans doute son air hautain, sa raideur toute diplomatique et son origine "coloniale" (il faut l'intelligence d'un Chamoiseau ou d'un Glissant pour se déprendre du "politiquement correct") en font un poète préparé à une certaine traversée du désert. Il est vrai qu'il y a chez lui une préciosité dans le langage et une ondulation métaphorique parfois agaçantes, souvent obscures. Malgré tout, dans certaines œuvres il s'abandonne à une plus grande simplicité. Les Images à Crusoé, écrites en 1904, en sont l'illustration. Neuf poèmes, parfois fort courts (Le Parasol de chèvre, L'Arc, La Graine), pour débusquer un Robinson contemplatif, revenu de la vindicte conquérante qui traversait le héros de Defoe. Le poète ne bâtit pas un roman (moins encore un projet édifiant de puissance politique) ; il approfondit le travail tarodant du retour au monde, à ce monde dont il aurait appris à se passer. C'est un viatique pour la suspension du présent inacceptable, et peut-être avons-nous tous intérieurement cette tentation de la fuite.

    Les Cloches est le premier poème de ce "recueil".

     

     

    LES CLOCHES

     

    Vieil homme aux mains nues,
    remis entre les hommes, Crusoé !
    tu pleurais, j'imagine quand des tours de l'Abbaye, comme un flux, s'épanchait le sanglot des cloches sur la Ville…
    Ô Dépouillé !
    Tu pleurais de songer aux brisants sous la lune ; aux sifflements de rives plus lointaines ; aux musiques étranges qui naissent et s'assourdissent sous l'aile close de la nuit,
    pareilles aux cercles enchaînés que sont les ondes d'une conque, à l'amplification de clameurs sous la mer…