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2-Mirek

"À l'aveugle" est un ensemble de douze photographies de Georges a. Bertrand, que celui-ci m'a envoyées sans la moindre indication. Il s'agit d'écrire pour chacune un texte dans ces conditions d'ignorance. Une fois achevé ce premier travail il me donnera les informations que je désire, et j'écrirai pour chacun de ces clichés un second texte : ce sera la série "À la lumière de..."

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Dirais-tu, Mirek, que c'est un petit matin ? Il n'y a pas de petit matin, tu le sais, toi, si par "petit", on voudrait croire qu'ici il y aura de la douceur, soleil juste comme il faut, commençant à rouler sa bosse, encore tiède de nuages hauts qui lui font voilette. C'est rare, très rare. Possible mais rare. Donc, pas de "petit matin".

À moins que tu veuilles signifier le rétréci du ciel, du chemin, de la respiration à contre-temps du pas, lui-même en retard, toujours en retard sur le tic-tac de la roue arrière qui tourne.

Cela, ainsi : après l'impératif réveil que j'ai placé à l'autre bout de la pièce pour m'obliger à fuir le lit, l'eau du broc qui ploque dans la cuvette en émail, les volutes du café bouillant, le tic-tac du vélo que je traîne (engin et ritournelle) depuis le pied de la côte, celle à la sortie du hameau. Je traîne cette feraille comme un chien près de crever. Elle me sera pourtant très utile, ensuite, pour les dix kilomètres jusqu'à la fabrique. Mais il y a un temps où il faut que je récupère de la pente. Ce n'est plus comme avant. Haleine en buée, brume au ras du sol.

Tic-tac de la roue, toujours, et plus un mot à dire sur le chemin depuis que tu es mort, Mirek, à l'automne.

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