usual suspects

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Pharmacopée de la terreur

http://citizenzoo.files.wordpress.com/2011/04/energy-shale-scott-goldsmith.jpg

Et quand ils n'eurent plus rien à mâcher que les vieilles lanternes vénitiennes dont ils s'étaient gaussé toute leur existence, plus rien à voir que la lune maquerelle sur les rumeurs du fleuve, plus rien à croire qu'à  la répétition de leurs envies, ils surent qu'ils étaient advenus à n'être plus que papiers lentement de mots glacés et cela leur fit moins peur que dépit. Où aller ? Mais ce n'était pas une affaire de distance, ni même d'endroit (alors qu'ils avaient déjà retourné la terre entière : ils en avaient fait des champs de ruines, des rizières asséchées peu à peu, des catacombes à ciel ouvert, ciel ouvert comme une plaie, des porte-containers grinçant à tous les vents, des forêts domestiques, des bivouacs de squelettes polis au sable). Pas une affaire de temps non plus car il n'était plus compté. À quoi se réduire, sinon à sa disparition ? Être son pharmakos, insensé, dérisoire. Mais il n'y avait plus d'extérieur, plus d'intérieur, rien que l'espace indifférencié de l'accompli, déjà révolu. Il faudrait  maintenant qu'ils fassent avec eux-mêmes et le lait caillé de leurs yeux, quand ils s'épiaient, le maxillaire imbu de leur défaite, la main sous le manteau, le talon griffant le sol : tout cela laissait présager un entre-tué somptueux, comme un jour lointain du Colisée.


                                                Photo : Scott Goldsmith

Les commentaires sont fermés.