On oublie souvent que Jean Genet, outre ses romans et ses pièces de théâtre, a écrit des poèmes, entre 1942 et 1947, dont les fameuses strophes du Condamné à mort, dédiées à Maurice Pilorge. Poésie classique (nous reviendrons sur le classicisme de Genet, essentiel) et fulgurante dont sont extraits les quatrains suivants :
LES ASSASSINS du mur s'enveloppent d'aurore
Dans ma cellule ouverte au chant des hauts sapins,
Qui la berce, accrochée à des cordages fins
Noués par des marins que le clair matin dore.
Qui grave dans le plâtre une Rose des Vents ?
Qui songe à ma maison, du fond de sa Hongrie ?
Quel enfant s'est roulé sur ma paille pourrie
À l'instant du réveil d'amis se souvenant ?
Divague ma Folie, enfante pour ma joie
Un consolant enfer peuplé de beaux soldats,
Nus jusqu'à la ceinture, et des frocs résédas
Tire ces lourdes fleurs dont l'odeur me foudroie.