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3-Se faire justice

La série "À la lumière de..." reprend les photos que Georges a. Bertrand m'avait proposées pour la série "À l'aveugle". Il m'a depuis donné les indications concernant leur localisation et les conditions dans lesquelles elles ont été prises.

 

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Je ne tombe jamais de haut lorsque le midi, avec les autres, je viens au pont qui surplombe l'Oronte. Jamais : je m'obscurcis d'une part d'oubli qui sourit en moi. Je regarde le ciel avant que de me lancer. Certains disent que c'est un jeu mais je n'y crois pas,. Un défi peut-être... Trop simple. Autre chose, d'indéfinissable.

Nous mettons une ardeur terrible à maintenir le reste du jour notre tête hors de l'eau, à ne pas nous enfoncer dans la tristesse la plus absolue. Et la peau, les os, les viscères, le cœur, l'air même que nous respirons, un brasier entrant par notre bouche, notre nez, plus pénétrant que le sable, tout cela finit par être insupportable.

Ici, tu peux faire l'ange, faire l'ordalie de la misère et du temps bouclé. Tu es une flèche et tu t'en vas. Dans l'intervalle que tu traverses, entre le sol et l'eau, tu es, en effet, parti, loin, corps anachorète sous le regard de ceux qui comme toi feront. Le plaisir est fugace, dit-on, mais tu t'en saisis et tu plonges avec lui. Il est tien quand, au temps où tu atteins l'astre que tu voyais il y a peu sous toi, la tension de l'eau.

Aussitôt, c'est le feu tranchant de la fraîcheur, mon corps blanchi de bulles qui lentement, lentement, s'évanouissent, puis un temps de suspension sous la surface avant de sentir le monde regonfler son commérage brûlant sur ma tête, ruisselante et superbe. La toile de ma chemise et de mon pantalon claque désormais au vent léger et la rive me reçoit comme une pluie souveraine.


Photo : le fleuve Oronte, à Hama, en Syrie, entre Damas et Alep

Texte "À l'aveugle" : Plongeoir

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