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Polymorphe...

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Étrange univers de violence symbolique, me dis-je, il y a quelques semaines, en voyant par hasard deux minutes d'une énième émission de divertissement où il s'agit de voter pour tel ou tel, d'éliminer, selon le bon plaisir de la démocratie téléspectatrice, un candidat ou un autre. Étrange passion de plus en plus répandue que de voir la sanction par sms (facturé 0,34 centimes l'appel) devenir la norme et de dégager les énergumènes (originellement parlant : les possédés... ou la télévision en diablerie exorciste. Mais de quoi ? De la bêtise ? Et qui sont les possédés, d'ailleurs ?) dont la trombine ne vous revient pas. Il doit y avoir une jouissance singulière à vouloir ainsi sanctionner, encore et encore, bien au chaud dans son canapé. Jouissance consternante et inquiétante que de regarder choir ceux que l'on a désignés, d'être quelque part (mais (in)justement invisible) vainqueur.

Ce phénomène est récent, sa pratique croissante, et on sait qu'il touche essentiellement ceux qui se sont le plus rapidement soumis aux nouvelles logiques de l'entertainment médiatique : les moins de trente ans, pour qui ont fait les émissions de ce genre...

Les moins de trente ans...

Ceux-là même qui n'ont cessé de réclamer à ce qu'on ne les discrimine pas en classe, ceux-là même qui n'ont cessé de contester l'ordre et la note, ceux-là même qui ont crié contre l'évaluation et la sanction.

Enkystée d'un moi débordant, infantilisée (et s'infantilisant) jusqu'à plus soif, cette nouvelle génération (x ou y, peu importe la dénomination) ne se prive pas de jouer à tous les coups les censeurs satisfaits. À la fois fière de soi et impitoyable. Il faut d'ailleurs voir ce à quoi on aboutit dans le désordre terroriste des mises en scène de soi et celle des autres sur Internet. Et le phénomène n'en est qu'à ses débuts.

Il n'y a pas de contradiction dans les termes. C'est même le fondement d'une nouvelle logique de représentation dont nous parlerons bientôt, ce mélange arrogant et cruel de décontraction et de fureur qu'incarnent les nouveaux symboles patronaux (à commencer par Zuckerberg en parangon...).

Souhaitons-leur d'avoir un jour à se mordre les doigts de s'être ainsi grisés d'un pouvoir de télécommande...

 

 

 

Photo :  Daniela Roman

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