Un jour, pour des raisons sur lesquelles je n'ai pas envie de revenir, raisons qui n'étaient, d'un certain point de vue pas les bonnes mais dont la fausse évidence cachait un souci plus profond, j'ai supprimé l'accès de ce blog aux commentaires. Je ne suis pas le seul. Plusieurs m'avaient précédé et d'autres ont suivi. Force est de constater que c'est une tendance plus affirmée que lorsque j'ai débuté Off-Shore.
Depuis, le lecteur peut donc trouver la mention "Les commentaires sont fermés". Je ne sais pourquoi cette formule m'intrigue. En effet, cet énoncé suppose qu'ils étaient préalablement ouverts, que l'essence même du blog est de permettre les commentaires. J'en viens même à supputer que le texte, ou l'œuvre, à l'initiale, n'est proprement qu'un prétexte pour qu'ensuite chacun vienne y mettre son grain de sel. De fil en aiguille, il y aura peut-être des chances pour que du sujet il ne reste plus, ainsi qu'on peut s'en rendre compte dans la version web des journaux, quand les lecteurs divers et variés s'étripent pour pas grand chose, voire pour rien. Pour rien : tel est je crois la vertu maligne du commentaire. D'être un comblement et une occupation pour que tout se délite.
"Les commentaires sont fermés". Quelques-uns s'en étaient offusqués, en privé. Quel dommage de ne pas pouvoir abonder ou discuter. Soit. Mais c'est faire de la discussion le principe ultime de l'échange. S'immiscer dans le bavardage et attendre un retour. Pourquoi devrait-il y avoir un retour ? Le texte (si c'est un texte, pour simplifier) est-il, comme à l'école, comme au lycée, ce "point de départ" pour pouvoir "parler de quelque chose" ? Ne faudrait-il pas mieux le prendre, aussi modeste soit-il, comme un viatique qui ne renvoie qu'à nous-même, comme lecteur ? N'est-ce pas le fonds le plus riche de l'échange ? A-t-on jamais regretté de ne pouvoir "échanger" avec la littérature ?
Si "Les commentaires sont fermés", ce n'est plus par simplification, mais par nécessité. Parce qu'on ne discute pas en public, au travers d'un écran, et parce que les compliments comme les invectives ne sont d'aucune utilité... Quelques mots, quelques lignes : on cerne là, le lissage du post, son insuffisance et sa concession à la dégénérescence de la phrase, de la syntaxe, et au bout du compte : du sens.
De toute manière ce qui est publié est déjà derrière celui qui l'a écrit, comme une archive, et l'écriture n'est pas un débat. C'est même la contradiction de la parole, forme à laquelle n'échappe pas, ou si rarement, le commentaire...