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Grosse ficelle (pour attacher un sifflet)

 

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Les sifflets à l'adresse du normal président, lors des cérémonies du 11 novembre, étaient-ils une insulte à la République ? Pour certains cadres (j'aime ce mot...) du PS, il semble que oui. Ils l'écrivent dans une tribune parue dans Libération, mélangeant ces incidents avec d'abjectes insultes effectivement racistes, dans une logique de l'amalgame dont les éduqués troskystes ont depuis longtemps le secret.

La goutte de trop, devant ces assauts multiples : les fameux sifflets, qui, en quelque sorte, auraient rompu la digue de la convenance républicaine, pour ne pas écrire la bienséance.

Il y a lieu de s'étonner d'une telle émotion. Le droit de manifester est-il restreint à ce qu'il ne puisse atteindre la personne du chef de l'État ? S'agit-il d'un crime de lèse-majesté dont on ne veut pas dire le mot ? L'heure est de toute évidence à la plus extrême gravité et le premier ministre a emboîté le pas en prévenant le lendemain des incidents que "la justice sera(it) ferme" face aux atteintes "à l'ordre public" et "aux droits de la République". Et d'ajouter que « la circulaire de politique pénale préparée par la garde des Sceaux va partir dans quelques heures, elle s'appliquera partout, dans toutes les régions et pour tous les faits qui portent atteinte aux droits de la République".  Qui, d'ailleurs, vise-t-il ? Les membres du Printemps français ? Les bonnets rouges ? Les contestataires qui s'expriment chaque jour de plus en plus nombreux ? Les manifestants qui sifflent ? Les protestataires qui brûlent des radars ? À l'entendre l'heure est à la mobilisation des forces patriotes. À quand l'appel aux armes  et la scie de la République en danger ?

Encore faudrait-il que nous y croyions à cette République dont les élites aujourd'hui au pouvoir ont commis un coup d'État en invalidant le referendum de 2005 par une ratification du Congrès en 2007... Je l'ai écrit à de multiples reprises : ce qui se passe aujourd'hui est le retour du refoulé, et le peuple fut, en l'espèce, le refoulé. Ceux qui sifflent sont le fruit de ce pourrissement. Et ce pourrissement fut organisé de conserve par les actuelles majorité et opposition, à commencer par l'actuel normal président. Il faut être d'une mauvaise foi ou d'un aveuglement sans bornes pour ne pas s'en rendre compte (1). Cet affreux détournement du suffrage universel, ce mépris souverain de la représentation nationale (on en a frappé d'indignité pour à peine moins) auraient pu passer si les années qui ont suivi avaient été roses, si le triomphe démocratique et économique avait été un démenti pour ceux qui avaient  voté non. Il n'en est rien. L'expression du refoulé ne fait que commencer, et, ce qui peut effectivement inquiéter, dans une région qui fut longtemps un bastion de la pensée socialo-européenne ...

Il est néanmoins intéressant de voir un premier ministre vouloir jouer le maréchal en chef d'un retour à l'ordre. Sans doute les sifflets sont-ils un délit dont il peut aisément circonscrire le danger. C'est toujours plus facile que la violence endémique des banlieues, le désarroi des campagnes, les trafics en tous genres et de laisser la République se faire ridiculiser par une écolière qui sèche un jour sur deux. Maréchal en chef est d'ailleurs un titre un peu gonflé. Mais cette soif de circulaires et de directives fait sourire : devant le désarroi, reste le paravent bureaucratique. Encore qu'à ce jeu, on puisse finir par craindre pour nos libertés publiques, à commencer par le droit d'expression.

La République du quotidien l'attend, elle, sur bien d'autres plans : économique, social, budgétaire... Mais aussi sur la sécurité, le respect de la laïcité, le combat contre le communautarisme. Elle l'attend au tournant. Encore qu'elle en ait déjà assez vu.


(1)Mais en entendant le premier ministre s'indigner de l'intervention d'un député d'opposition et demander si ce dernier remet en cause la légitimité du normal président et en conséquence la légitimité du suffrage universel, on n'est plus dans la mauvaise foi : on est, étymologiquement, dans l'ignoble. Comme quoi, la majesté républicaine ne vole pas haut...

 

Photo : Darcy Padilla 

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