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  • McCartney, berceuse...

    Deux minutes et demie de douceur, comme une berceuse pour gagner le sommeil en toute quiétude. Paul McCartney n'a pas, dans la pop, d'égal en matière de mélodie. Black Bird, écrit en 1968, en est la preuve.


  • L'encombrement du virtuel

    Dernièrement, une mienne connaissance s'alarme. Son portable a rendu l'âme (en fait, il n'en sera rien. Il ressuscite le lendemain (1)) : elle n'avait pas sauvegardé des photos. Elle ne les avait pas exportées sur son cloud. Tel est l'indispensable de la communication actuelle : avoir son nuage (à défaut d'être sur un nuage, ou dans les nuages), où tout le précieux informatif de l'existence sera préservé. 

    Ainsi sommes-nous environnés sans le savoir d'une nébuleuse atmosphérique codée en je ne sais quel langage, une sorte de banque de données invisibles où je puis aller chercher ce que je ne veux pas perdre...

    Un nuage, donc. Un cloud. La métaphore ne manque pas de sel, si l'on veut représenter l'impalpable, mais c'est justement dans la facilité de la comparaison que naît la mélancolie. Triste nuage contemporain, en effet, que celui-ci, par quoi je deviens banquier d'une mémoire, la mienne, sans épaisseur, sans matière. Sinistre représentation que d'imaginer l'individu suivi comme son ombre par son nuage fourre-tout, dont il peut saisir à chaque instant une donnée, un élément, une information.

    L'étranger de Baudelaire, dans Les Petits Poèmes en prose, tirait sa singularité et son mystère de ce qu'il parcourait le monde en regardant les nuages, les vrais, avec leurs formes changeantes et rêveuses. Ce n'était pas un bagage que ces métamorphoses perpétuelles qui le faisaient lever les yeux mais une destination (pour ne pas dire : un destin). Ils étaient dans le monde et leur existence transitoire n'était pas vaine mais une manière de pénétrer dans ce monde. On y mélangeait l'improbable des correspondances et le libre vagabondage des coïncidences. Les nuages n'étaient pas rien : ils furent une des raisons d'être de la peinture, des Flamands tourmentés aux impressionnistes évanescents. Le nuage court devant les yeux ravis, comme un des rares plaisirs enfantins qui ait pu survivre à notre rigueur d'adulte. Il suffit de ne rien faire, d'être là, les bras croisés ou derrière la tête, à la proue d'un navire ou sur la grève, et de passer des heures à contempler la solitude d'une ouate dans un ciel très bleu, ou le vertige d'un ciel qui se noircit. Ce n'est pas rien faire que d'engranger une beauté furtive, parfois légère, parfois soucieuse. Ce sont les nuages qui articulent mieux que tout notre ébriété amoureuse et notre soif d'aventure. Le nuage est beau de la perte qu'il préfigure et de la liberté qu'il nous laisse. 

    Le cloud informatique et contemporain est la négation de tout cela. Il est une prothèse de notre assujettissement à l'immédiat. C'est une décharge, une poubelle. Une poubelle pour têtes cumulatives. C'est le capital du vide.

     

    (1)Il faut être moderne et mélanger les références et, en l'espèce, le portable est une transcendance du contemporain.