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muisique

  • La voix d'une seule...

    Dans Toxic Blues de Ken Bruen (lecture pas trop concentrée pour ceux et celles qui veulent échapper à l'angoisse de l'avion), le héros rappelle qu'à ses débuts Dire Straits bénéficia d'un succès public certain mais aussi d'une reconnaissance du monde de la musique pop (revues, magazines, spécialistes...). L'affaire se gâta le jour où Lady Di dévoila que c'était son groupe préféré. Dès lors, il n'était plus possible, quand on était un amateur éclairé, d'apprécier Mark Knopfler et sa bande. Ceux-ci tombaient radicalement du côté des productions easy-listening, commerciales, de celles qu'on doit mépriser.

    Pour être simple : peut/pouvait-on partager (sur un point s'entend) les goûts d'une princesse permanentée, au sourire un peu niais ? Sans doute pas, quand on se voulait décalés, underground, ou, pour le moins, hors des cadres bourgeois, etc, etc, etc.

    On en revient, mais dans un sens inversé, à la question de la distinction qu'avait abordé il y a déjà longtemps Pierre Bourdieu sur ce qui détermine nos choix et ce par quoi nous nous affirmons. Les goûts ne sont pas qu'une affaire de réflexion ou d'affect. Ils sont aussi, dans le double sens du terme, un placement sur le marché, une manière de se distinguer et d'être distingué. En clair, l'appartenance revendiquée, l'effet de démarcation et le souci de reconnaissance comptent autant que l'objet dont il est question. 

    Dans le cas présent, on retiendra que ceux qui ne veulent pas être pris dans le mainstream se sont comportés comme des petits bourgeois de base. Ils ont illustré, à leur insu, combien la singularité culturelle, dans un monde de récupération systématique, est un leurre (1). Ils ne valent pas mieux que Giscard prenant de la hauteur avec son accordéon tout en voulant faire peuple. Beaucoup de bruit pour du vent...

    Dire Straits n'en a pas pâti. Knopfler a accumulé les millions. Mais ce revirement m'amuse.

    Même si l'on rétorquera qu'il ne pouvait pas en être ainsi, on jubilera à l'éventualité qu'un normal président ait un jour glissé son irréductible passion pour Dominique A., ou que son bling-bling prédécesseur, plutôt que Barbelivien et Bruni, n'ait eu d'oreilles que pour Noir Désir. Un Hollande ou un Sarkozy un tantinet alternatif, indie ou grunge. Juste pour embarrasser Libé, les Inrocks et toutes les poubelles du même genre...


    (1)À lire, malgré tous ses défauts de construction et ses raccourcis, Joseph Heath et Andrew Potter, Révolte consommée. Le mythe de la contre-culture, ed. Naïve, 2005 

  • Donald Fagen, avec style...

    La discographie solo (1) de Donald Fagen est fort réduite. The Nightfly (1982), Kamakiriad (1993), Morph The Cat (2006) et le récent Sunken Condos (2012). Quatre albums en trente ans, c'est pour le moins un rythme peu soutenu, quand on considère la logique du tiroir-caisse qui fait fonctionner l'industrie de la pop.

    Quatre fois le même bonheur d'une musique développée avec mesure. Les arrangements sont d'un raffinement sans égal, les cuivres et les voix placés avec grâce. Pop-jazz urbaine, américaines en diable, les compositions de Fagen portent en elles le lumineux fantasme d'une West Coast ensoleillée (mais sans excès), lancé que nous sommes dans une promenade en décapotable, pare-choc chromés, peinture rutilante, vitesse lente, Ray-Ban en guise d'identité, accompagné d'une belle qui contemple avec une négligence affectée le paysage (une belle pulpeuse comme les derniers soleils hollywoodiens des années 50, pas le toc du présent). Fagen, c'est un glamour feutré et sophistiqué, l'éclat d'une vision cinémascope, sur le plan musical (lequel contraste avec les textes de plus en plus graves). C'est une rêverie courant sa brise, en front de mer.

    Les morceaux ont été enregistrés ailleurs, dans divers studios new yorkais (de Power Station à Sear, d'Avatar à  Stratosphere) sur la Côte Est. Sans doute faisait-il froid. On est là pour travailler. Mais notre humeur, à l'écoute de cette musique, nous porte à des milliers de kilomètres, Et peu importe que nous y soyons ou non allés...

    Quatre morceaux, un par album...

    Maxine (extrait de The Nightfly)

     


     

    On the Dunes  (extrait de Kamakiriad)

     


     

    Security Joan (extrait de Morph The Cat)

     


     

    Slinky Thing (extrait de Sunken Condos)

     


     

    (1)Nous laisson de côté sa collaboration ancienne avec Walter Becker au sein de Steely Dan

  • Schubert, loin du bruit...


    Quand tu n'as rien à dire, rien envie de dire, donne à ton tour ce qu'on t'a donné.


  • Bill Frisell, une échappée belle

    Il est peu de musiciens que j'ai eu envie d'entendre en concert. Les concerts m'ennuient. Mais de voir un jour la grande carcasse de Bill Frisell (comme celle de Brad Melhdau d'ailleurs), je l'espérais. Cela s'est produit il y a une quinzaine d'années, dans une salle modeste de la banlieue lilloise. Le regretté Paul Motian était à la batterie, Joe Lovano au saxophone. Rien de moins. Ce fut un moment rare. Bill Frisell est un guitariste rare.  Le morceau s'intitule Winter always turns to spring. Et justement c'est le printemps...


  • Quelque chose d'incertain...

    Anouar Brahem est un grand musicien, capable de traverser des univers multiples, jusqu'à croiser Garbarek ou Surman. Dans Le Voyage de Sahar, il donne la part belle à un échange avec l'accordéon de Jean-Louis Matinier. Tout y est délié et incertain et les compositions rappellent, dans une lenteur qui n'est ni morose ni fébrile, Uzak, tourné par Nuri Bilge Ceylan. Un Bosphore de neige et de mots retenus...

    Отчуждение, Uzak, фильм, кино

     

    À moins que dans la dérive du chant Matinier, l'esprit glisse vers  une essence sud-américaine, où sous l'orage de Buenos-Aires, tout d'alpaga vêtu, est prévu quelque rendez-vous dans un café dont une rencontre fortuite a parlé comme d'un lieu borgésien...


    Overview of the Buenos Aires's city and its docks in the background during a heavy rainstorm, August 12, 2011. REUTERS-Enrique Marcarian

                                                                        Photo : Enrique Marcarian       


    À moins que ce ne soit, le corps au parquet, le regard dans le sens des poutres (dehors les nuages font du lait), un moment de repli...

    À moins que ce ne soit tout ce que permettent les dérives de l'imagination, anywhere in the world...

    Le morceau s'intitule Sur le fleuve.

     


     

     

  • Haydn, hors nation

    Aux passionnés d'hymnes patriotiques (il doit y en avoir), il n'aura pas échappé que l'Allemagne offre la plus élégante mélodie qui soit, à vous donner l'envie du garde-à-vous (enfin presque...) ! Normal, dira-t-on, puisqu'il s'agit du deuxième mouvement du quatuor dit "L'Empereur" (op. 76, n°3) de Joseph Haydn. À suivre dans une interprétation "classique" du Quatuor Mosaïque. Rien ici de pompeux ou de martial : ce serait plutôt un fil précaire qui promène loin, loin...