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  • Nimby

     

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    La real politik est un fait et ceux qui s'en offusquent sont ou des idéalistes un peu idiots ou des menteurs. Ils négligent le fait que la totalité des citoyens ne peut ni ne doit s'identifier à un pouvoir, moins encore à une nation. Encore faudrait-il croire en la nation, ce qui est de moins en moins vrai. L'État, c'est d'abord l'exception, si l'on se penche du côté de Carl Schmitt, ou la violence légitimité si l'on prend l'option Max Weber. Dans tous les cas,  ce n'est jamais propre et ragoûtant.

    Beaucoup ont sur le sujet la même posture que celle qu'ils adoptent avec les forces de l'ordre. Ils en conchient l'existence mais sont les premiers à courir au poste quand on a fracturé leur domicile. Ce n'est qu'une variane du fameux principe nimby (not in my backyard) : pas chez moi, mais chez les autres, tant que vous voudrez. Le cynisme commence là et ceux qui vilipendent l'immoralisme politique sont les mêmes qui s'en vêtent quand il s'agit de leurs petits intérêts.

    En fait, le problème majeur de la real politik n'est pas tant son existence que sa visibilité. C'est là que le bât blesse. Si elle existe, elle doit se faire la plus discrète possible. L'intelligence politique tire pour une part sa force de sa capacité de dissimulation. Sinon vous passez pour un idiot, un salaud ou un fantoche.

    Un exemple.

    Quand la diplomatie française se met en avant pour faire tomber le régime de Bachar Al-Assad en Syrie au nom d'une énième croisade droit-de-l'hommiste, il y a lieu de s'étonner que des candidats djihadistes majeurs (entre 20 et 28 ans) soient arrêtés sur notre sol. Pour quelle raison ? Parce qu'ils vont rejoindre des forces radicales qui veulent la destruction de la démocratie, de l'Occident et l'imposition d'un islam politique sans nuances ? Parce qu'ils vont alimenter un terreau terroriste ? Parce qu'ils vont devenir les futurs prêcheurs d'un radicalisme banlieusard ? On aimerait des éclaircissements sur ce point de la part des autorités. On aimerait plus de cohérence.

    Pourquoi alors, ce qui serait bon pour les Syriens ne le serait pas pour nous ? Pourquoi les rebelles syriens seraient-ils estimables là-bas et inquiétants ici ? Pourquoi, au fond, voulons-nous la fin de Bachar Al-Assad, quand nous nous faisons les carpettes des puissances saoudienne et qatari, lesquelles financent, et tout le monde le sait, les mouvements radicaux de l'islam ?

    Que l'on nous cache des choses est logique, normal. Qu'on ne sache pas nous les cacher est une faute, une erreur politique...

     

    Photo : Jean Gaumy

  • Écouter, répéter, manipuler

    Lorsque vous vous éloignez un peu de la France, sans en prendre la moindre nouvelle, sans ouvrir vos mails, ni lire aucune feuille de chou qui prétend à la grandeur journalistique, et que vous revenez, il est stupéfiant de voir combien la mare s'est agitée : les magouilles des uns, les écoutes des autres, des ententes des troisièmes. Rien de bien neuf, rien de très terrible non plus. Si l'on excepte les naïfs qui voudraient voir la politique comme un territoire honnête et désintéressé (1), il faut reconnaître que le débat sur les manipulations des uns et des autres tourne vite à la querelle des exemples choisis. Ce n'est pas de l'argumentaire mais de la casuistique de jésuites.

    Prenez l'affaire Buisson. On s'offusque des habitudes dictaphoniques de l'homme de confiance sarkozyen. On crie ici à la trahison : les UMP grotesques, là à l'affaire d'état : les socialo-moralistes. Je ne vois pourtant dans cette pratique ni trahison, parce que cela supposerait qu'il y ait eu exploitation de la matière (or, on a visiblement volé celle-ci au dit Buisson), ni affaire d'état, parce que cela supposerait que nous ayons, nous petit peuple, à connaître des histoires lourdes de conséquences, et je n'en crois rien, sinon l'affaire aurait déjà explosé.

    Buisson est peut-être un traître et c'est beau alors d'entendre la Sarkozye s'indigner. Buisson est peut-être quelqu'un qui en sait plus qu'on ne le croit et c'est alors curieux de voir les affidés gouvernementaux s'indigner.

    Mais quoi qu'il en soit, nous sommes loin, je trouve, avec ces discussions de fond de tiroir des pratiques ouvertement crapuleuses d'un Mitterrand qui, pour s'assurer sa réélection, faisait état en direct de ses discussions avec son premier ministre d'alors (2). Quand on a toléré de telles pratiques florentines (tous les moyens sont bons), on ne va pas s'acharner sur un vulgaire conseiller (3).




     

    (1)Ceux-là feraient bien de relire Balzac et Chateaubriand, à tout le moins. Quant à lire La Rochefoucauld, Saint-Simon et le cardinal de Retz, ce serait trop leur demander. Ils apprendraient néanmoins des mémoires classiques ce qu'il y a d'essentiellement retors dans la politique.

    (2)Pour épargner au lecteur la totalité d'un ennuyeux débat, il pourra glisser le curseur sur la douzième minute. Il s'agit de l'affaire Gordji. Pour la petite histoire, on sait que des deux, c'est Mitterrand qui ment.

    (3)Nul ne s'est jamais indigné des Verbatim de l'inutile Attali

     

  • Contrepoint, Miossec

    La rapacité affichée des deux premiers albums de Miossec (les opus suivants, ma foi, on s'en passera, ou presque) n'a jamais autant de vérité qu'aux premiers beaux jours, quand le cirque recommence sur les places et terrasses. Quelque chose qui vous remet les idées en place.

    Il y a à Boire (1995)


    et à Baiser (1997)


  • Possible

     

     

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    J'entends l'humeur gargarisante de la confiture qui cuit, derrière moi, de la véranda où je surveille l'ultime brasier du jardin : mélange de branches dénouées, de feuilles sèches et de coques de noix.

    C'est un beau navire que l'automne.

     

    Photo : Éric Dessert

  • À l'œil nu

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    C'est une sorte de temps idéal, l'illusion qu'il pourrait ne rien arriver, quand la brume, mobilis in mobile, se départage des eaux du lac.

    Elle monte dans la certitude de son inconséquence pendant que le jour s'installe, lui, durablement.

    Moment subtil où elle existe de toute sa disparition prochaine.

    Le soleil perce déjà.

     

    Photo : Minor White