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Les abrasions - Page 2

  • Comme on n'oublie pas...

    En 1994, William Sheller file en Angleterre pour trouver le son pop et la liberté que lui offrent des musiciens pour qui il n'est qu'un inconnu, ou presque. Il en revient avec un album intitulé Albion. On est loin des excès symphoniques ; on s'éloigne des calques trop classiques. Sans aucun doute sa plus grande réussite, avec des bijoux comme La Navale, Relâche, On vit tous la même histoire et un Excalibur revisité à l'acide.

    Il y a aussi la composition qui suit, belle, profonde touchante.


  • Il n'y aura...

    jamais assez de tiroirs pour cacher les souvenirs, ni garde-meubles pour être certain de revenir, moins encore de ficelles pour faire comme si...

  • Dernière balise avant la pleine mer

    Parti. C'est ainsi. Pas la question que ce soit bien ou pas. Il n'y a pas de tristesse. Quand on part, la voile avait été hissée depuis longtemps. On ne disparaît pas (et de fait ce n'est pas la question). On est ailleurs et déjà loin. Merci à ceux qui ont suivi Off-Shore...

  • La porte d'entrée...

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    Tu crois, à première vue, que tout est net, dans le vaporeux même, qui a valeur de signature.
    Le monde est ainsi construit, dans la pesanteur du quai froid et la fluidité lourde du train en partance. Tout est en place et c'est un univers à la fois en mouvement et sans hommes. La machine et la structure ont prise sur l'essentiel.
    Le bruit est comme assermenté par l'image...
    Et toi, tu ne vois que la rayure, au milieu, le défaut technique de la vitre derrière laquelle tu regardes le monde t'échapper. C'est l'éraflure sur le vernis de l'illusion, celle d'un ongle sur la peau, la peau de la vie filante...

     

    Photo : Philippe Nauher

  • Maintenant que tu le dis...

    Tu découvres le monde et c'est trop tard. Tu es divisé, et la part la plus belle de ton espérance est quelque part... Les horloges sont déréglées et, comme dans les perspectives que l'on croit si vraies, dans des tableaux que l'on croit si justes, tu glisses, insensiblement vers ce que tu n'as jamais été...

  • Voilà...

    On n'a plus parlé d'elle. Jamais. C'était comme si elle n'avait jamais existé, alors même qu'on savait justement qu'elle avait été au centre d'existences multiples.
    Mais il semblait que d'avoir tant voulu décider de tout et pour tous l'avait rejetée dans la fosse silencieuse des souvenirs proscrits. Il arrivait que son prénom resurgisse, au détour d'une phrase, dans les méandres d'une anecdote. Rien de plus. Elle comptait désormais moins que la moindre inscription sur le monument aux morts.
    Ce n'était pas de la détestation, ou de l'indifférence, mais la déchéance insidieuse de qui avait cru en son destin, un destin qui regardait les autres comme s'ils n'avaient jamais été que des instruments, des objets, des passe-temps. Et plutôt que de s'échiner à régler des comptes post-mortem, la commune raison avait pris le parti d'aller outre, d'être elle-même le ruisseau décomposant sa postérité.

  • Téméraire

    Il s'abandonna au dépourvu, plutôt que d'être pris d'un doute sur ce qu'aurait été une décision mûrement réfléchie. Le temps lui rendit grâce de sa modestie, à ne pas en vouloir plus que nécessaire. Il était lucide et ceux qui portaient épaulettes ou cravates sévères le faisaient sourire. Il savait qu'un jour nul ne dirait plus un mot de lui, que, pour personne, il ne serait, sinon une pause généalogique dans le passe-temps ordinaire des gens amusés du passé...

  • La Loi des séries

    Tu nous permettras, dit-il, de douter. Par principe. Sur tout et pour tout. Non que ce soit une pose ou un confort. Mais c'est mieux que rien. Parce que. Écoute, quoique je sois plutôt tenté de dire : regarde.

  • Erri de Luca, l'éternité

    "Ceux qui s'arrêtent se rencontrent, même une maman jeune et un fils vieux. Le temps est semblable aux nuages et au marc de café : il change les poses, mélange les formes.
    Nous sommes immobiles sur la photographie, mais toi tu sais ce qui va arriver parce que tu es allée plus loin. En revanche, moi je sais qui tu es, mais j'ignore la suite que toi tu connais. Moi je connais ton nom, toi tu connais mon destin. C'est là une bien étrange situation. À l'opposé, il y eut un temps où tu mettais au monde un petit être, lui donnant un nom, mais ignorant ce qui allait lui arriver. Maintenant tu es devant la vitre à travers laquelle tu vois la suite, mais tu ne sais plus à qui elle appartient.
    Le moment arrive où une mère va vers le fil de son fils, l'air préoccupé, et ne le reconnaît pas. Elle va comme à travers champ, effleurant de ses doigts l'herbe haute. Moi je suis le fil et le fils que tu regardes.
    Je sais que je suis en train de mourir. D'autres avant moi virent leur mère s'approcher sans les reconnaître ; ils l'appellèrent par son nom, mais peut-être y avait-il une vitre. Une mère va dans un champ, le regard fixe dans le vent qui fait ployer la pointe de l'herbe, arrive au fil, au fils et le recueille. C'est ainsi que tu me préviens : tu viendras vers moi, comme tu venais vers mon petit lit éteindre la lumière."

              Erri De Luca, Une fois, un jour (1989)

  • Romance

    Comme disait la parole commune : va voir si j'y suis. Mais tu n'y étais pas. Ni toi, ni personne, une personne qui aurait pu compenser le fait que tu n'y étais pas, la surprise pour racheter la déception. Alors on prétend que ce n'était pas plus mal. Et même, d'une certaine manière,rassurant, parce qu'ainsi je pouvais envisager l'avenir avec le plus de liberté possible. J'aurais aimé, néanmoins, il ne faut pas se mentir, que tu y fusses. Non que je sois avare de mes pas et de mes heures. J'ai appris à multiplier les premiers et à perdre les secondes. Il n'y a jamais d'urgence, ou si peu. Mais tu n'y étais pas. Le redire, le récrire est une manière d'avouer que le mal était fait, et sans rémission. Telle est la vérité : le chemin que tu as parcouru pour te retrouver dans le dénuement, même bref, même épisodique, n'est jamais payé de retour.