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  • Opération à cœur ouvert

    Sache, dit-il, que je ne suis jamais plus en face de toi que lorsque tu ne me vois pas. Il y a présomption à croire que l'on puisse s'exempter de l'espace et du temps.

     

     

  • XTC, pizzicati et spirales

     

    La composition qui suit, extraite du meilleur album de XTC, Apple Venus vol.1, est un bijou d'Andy Partridge qui renvoie les étoiles de la pop filante à leur futilité. Elle s'intitule River of Orchids.

     


  • La Loi de l'offre

    Il était un peu plus de sept heures du matin. Nuit et froid vif. Il avait en lui la prolongation d'un sommeil perdu et pesant. Sur un de ces grands panneaux d'information, lumineux : ornementation urbaine, il lut : cimetière de ..., reprise emplacements location 50 ans, puis un numéro de téléphone. 

    Il a tout de suite associé cette annonce à la publicité automobile. Sans doute à cause du mot reprise. Il y avait donc, au cimetière, des places qui se libéraient, un peu comme une volée de retraités qui laissent des postes vacants. Et son esprit a rêvassé sur ce que pouvait être la promotion d'un emplacement (ce sont alors des images anciennes de camping qui ont surgi : délimitation, caravanes, toiles de tente, piquets, sardines, barbecue, apéro,...) funéraire. 

    Fallait-il imaginer des prix d'appel, des soldes, un argus, l'encan, ventes à la bougie, ventes à la criée (et il aurait évidemment acheté le lot 49, comme un timbré). Des bougies de marchandage plutôt que celles du deuil. Reprendre impliquait qu'on creuse, déterre, nettoie, et refourgue les restes il ne savait pas où... Politique d'assainissement et de rentabilisation du plan cadastral. C'était d'ailleurs, en vertu de cette inquiétante raréfaction des espaces que la crémation avait le vent en poupe, pour finir en cendres et être répandu, la prétention n'ayant pas de prix, sur les ruines du Palatin, comme Montherlant, ou face à la mer : pointe du Raz, avec l'esprit d'aventure. Sans doute, au colombarium, l'espoir d'être à demeure était-il plus grand, alors que le cimetière, au prix du mètre carré, est un odieux gaspillage.

    Mais on pouvait donc toujours y trouver un emplacement. Ensoleillé, à l'abri des cyprès, près de la porte d'entrée, "dans un coin", selon les désirs et l'éventuelle fortune de chacun. Peut-être y aurait-il affrontement pour des endroits privilégiés, et quelques passe-droit pour que le fils d'untel ou la sœur de Chose puisse trouver logement à sa convenance. 

    C'était inscrit sur le panneau lumineux, comme on y trouvait, régulièrement et pêle-mêle, les horaires d'ouverture de la mairie d'arrondissement, l'annonce de la prochaine braderie, celle du nouveau spectacle du théâtre pour enfants...

  • L'ignominie (II)

    En découvrant hier la composition de la nouvelle équipe hollandaise (1), on n'en croit pas ses yeux. On relit. On se fend même d'un troisième examen, pour enfin éclater de rire. Un rire sombre, écœuré, teinté de rage. On pensait que le corrézien avait atteint des sommets dans le ridicule, mais, en la matière, il faut toujours relativiser. Le pire est souvent devant nous.

    Ainsi donc avons-nous depuis jeudi une secrétaire d'Etat à l'aide aux victimes (2). L'heureuse élue s'appelle Juliette Méadel. Si je m'en tiens à l'intitulé de ses attributions et au contexte sinistre dans lequel nous vivons, j'en déduis qu'elle doit son poste à l'Etat Islamique. Sans les 130 morts parisiens, elle n'aurait sans doute pas pavoisé (3) ministériellement. Je suis certain qu'elle va nous la faire sur le mode : les victimes, le souci du gouvernement, la solidarité nationale, et j'en passe. C'est à vomir. Il fallait qu'on lui trouve un maroquin et le corrézien n'a rien trouvé de mieux. Le compassionnel ad nauseam.

    Je ne voudrais pas être Juliette Méadel parce que j'aurais du mal à me regarder dans la glace le matin. Accepter une telle nomination relève d'un comportement putassier et arriviste. Elle n'est pas la seule : le retour d'Ayrault renvoie à la même logique. Mais puisqu'elle doit s'occuper des victimes du temps, elle peut aussi s'attacher aux victimes du hollandisme : les chômeurs dont le nombre n'a cessé d'augmenter et qu'on traite de fainéants, les pauvres encore plus pauvres, les SDF qui n'en peuvent plus. C'est certain :  pour aider les victimes de son boss, elle aura du travail. Seulement, je ne crois pas que ce soit les sans-dents qui l'intéressent, son patron.

    Cynisme pour cynisme, j'espère qu'elle enverra un tweet à l'enturbanné de Baghdadi. Faut assumer, mémère, faut assumer...

     

    (1)Le terme "gouvernement" est inapproprié tant ces gens-là sont ineptes, et inaptes à gouverner...

    (2)Laquelle fait passer la secrétaire d'Etat à l'égalité réelle au second plan, c'est dire combien nous sommes tombés bien bas. La multiplication des blagues de mauvais goût finit par minorer ce qui, par ailleurs, est d'une débilité sans nom.

    (3)Faut-il alors que nous sortions les drapeaux ?

  • Les Commentaires sont fermés.

    Un jour, pour des raisons sur lesquelles  je n'ai pas envie de revenir, raisons qui n'étaient, d'un certain point de vue pas les bonnes mais dont la fausse évidence cachait un souci plus profond, j'ai supprimé l'accès de ce blog aux commentaires. Je ne suis pas le seul. Plusieurs m'avaient précédé et d'autres ont suivi. Force est de constater que c'est une tendance plus affirmée que lorsque j'ai débuté Off-Shore.

    Depuis, le lecteur peut donc trouver la mention "Les commentaires sont fermés". Je ne sais pourquoi cette formule m'intrigue. En effet, cet énoncé suppose qu'ils étaient préalablement ouverts, que l'essence même du blog est de permettre les commentaires. J'en viens même à supputer que le texte, ou l'œuvre, à l'initiale, n'est proprement qu'un prétexte pour qu'ensuite chacun vienne y mettre son grain de sel. De fil en aiguille, il y aura peut-être des chances pour que du sujet il ne reste plus, ainsi qu'on peut s'en rendre compte dans la version web des journaux, quand les lecteurs divers et variés s'étripent pour pas grand chose, voire pour rien. Pour rien : tel est je crois la vertu maligne du commentaire. D'être un comblement et une occupation pour que tout se délite. 

    "Les commentaires sont fermés". Quelques-uns s'en étaient offusqués, en privé. Quel dommage de ne pas pouvoir abonder ou discuter. Soit. Mais c'est faire de la discussion le principe ultime de l'échange. S'immiscer dans le bavardage et attendre un retour. Pourquoi devrait-il y avoir un retour ? Le texte (si c'est un texte, pour simplifier) est-il, comme à l'école, comme au lycée, ce "point de départ" pour pouvoir "parler de quelque chose" ? Ne faudrait-il pas mieux le prendre, aussi modeste soit-il, comme un viatique qui ne renvoie qu'à nous-même, comme lecteur ? N'est-ce pas le fonds le plus riche de l'échange ? A-t-on jamais regretté de ne pouvoir "échanger" avec la littérature ?

    Si "Les commentaires sont fermés", ce n'est plus par simplification, mais par nécessité. Parce qu'on ne discute pas en public, au travers d'un écran, et parce que les compliments comme les invectives ne sont d'aucune utilité... Quelques mots, quelques lignes : on cerne là, le lissage du post, son insuffisance et sa concession à la dégénérescence de la phrase, de la syntaxe, et au bout du compte : du sens.

    De toute manière ce qui est publié est déjà derrière celui qui l'a écrit, comme une archive, et l'écriture n'est pas un débat. C'est même la contradiction de la parole, forme à laquelle n'échappe pas, ou si rarement, le commentaire...

  • C...

    Ce qui n'a pas été vécu a été vécu, malgré tout, d'une manière fracassante et irrésolue.

  • La Raison du sol

    Pour être, il faut avoir les pieds au sol. Peut-être notre hyper-modernité, à force d'élévation, d'ascenseurs à haute vitesse, d'escalators en tout genre et de constructions aux étages incalculables, l'a-t-elle oublié... Pourtant, l'homme, c'est l'humus, par le biais de la racine indo-européenne *ghyom. Ce qui se décompose pour nourrir, ce qui est là, dans la durée, ce qui s'installe : le terreau de son histoire, au-delà de lui-même. À ce titre, la filiation n'est que la prolongation de l'assignation au monde qui nous entoure.

    La Raison du sol n'est pas l'inertie faisandée qu'en font ses détracteurs mais l'indice de ma relation à ce même sol, et par relation il faut entendre à la fois le lien et l'histoire, ce formidable scénario de cendres, de poussières et de boue qui m'assigne doucement ; le chemin inventorié mainte et mainte fois que j'emprunte et le grave répertoire des empreintes, les miennes et celles du prédécesseur. Je ne sais pas m'orienter sans ce sextant sur la mer du temps et les vicissitudes des années. Tous les exilés le savent : ce n'est pas nostalgie (maladie de la guerre s'il en est, déterminée au XVIIIe siècle) que de sentir sa foulée se dérober dans l'ornière du passage qui reste passage, mais bien plus de ne pouvoir rebattre le terreau connu.

    Même les plus cosmopolites, qui chantent à tue-tête le besoin du voyage, concèdent qu'en quelque lieu, oui, là est leur enracinement, là demeurent leur havre et leurs silences les plus profonds. Ils mentent, et deux fois : aux autres et à eux-mêmes, ces gargouilles du passeport rempli, ces haineux de la répétition (alors qu'ils sont justement dans la répétition, la plus mortelle, celle de l'épuisement prétentieux face à un monde qu'on ne peut épuiser, sinon à le méconnaître totalement). Il n'y a pas à les envier, non plus qu'à les plaindre, mais à ne pas leur ressembler.