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  • Quelques indices...

     

     

     

    carte d'identité 1 73 06 33 373 228 clé 14 ; tatung7979@hotmail.fr ; carte de photocopies 412 ; carte bancaire 555 56 354 892 656 ; code d'entrée d'immeuble 47A01 ; professionnel autoritaire (test printanier Le Nouvel Obs) ; place de parking -554 ; carte abonnement bibliothèque 054859238430999E ; code accès comptes bancaires HHU666, mot de passe **** ; contrat téléphonique ZOZI2390989 ; carte Smiles sncf 99478 ; police d'assurance habitation 2002938374 ; licence fédération française de badmington 494903 ; carte grise SV2341HA ; amoureux réservé (test estival Elle) ;  carte Flying Blue DON646H7H ; browneyes_h2@gmail.com ; 00100 1000001 1111 010101 0010 0010 1010 (quelque part dans un fichier qu'il ne connaît pas) ; lkdklfleaifnflmfefailkfonnnfa ; brun, type caucasien, yeux gris ; métrosexuel (test Biba) ; plus sucré que salé (test Cuisine aujourd'hui) ; Facebook n°32865445 ; carte abonnement bus 09853998 ; Tolstoi, Kierkegaard, Morand ; pointure 41 ; rhésus B+ ; numéro fiscal 14 78 969 213 101 V ;  (en cours)...

  • Rhétorique française : Fillon.

     

    http://www.biladi.fr/sites/default/files/Eva-Joly-2011.jpg

    Concernant le premier ministre François Fillon, il est toujours possible de remarquer que son parcours intellectuel ne plaide guère en sa faveur. D'abord fidèle par les fidèles du seul homme politique intelligent de ces trente dernières années, Philippe Séguin, il est devenu le fantoche de Sarkozy, lequel ne brille pas, c'est le moins qu'on puisse dire, par ses hauteurs de vue en matière de politique. Il y a dans sa trajectoire un dépérissement qualitatif certain. Néanmoins, il n'avait pas encore cédé à la bêtise facile, jusqu'à l'affaire Joly début juillet.

    La stupidité est paradoxalement plus criante lorsqu'elle prend un bouc émissaire, plus voyante encore lorsque celui-ci n'a pas a priori vos faveurs et que tout à coup vous avez envie de le défendre. Ainsi Éva Joly... Sa désignation comme candidate des Verts me la rend peu sympathique (politiquement parlant s'entend, parce que, pour ce qui est de sa personne, je n'ai rien à en dire...). Cette madame Joly a donc eu l'occasion de dire tout le mal qu'elle pensait de l'étalage militariste et incidemment belliciste dont la République française s'enorgueillissait le jour de la fête nationale. Ce jugement, même si on ne le partage pas, n'a rien en soi d'excessif. Ce qui l'est plus tient dans la comparaison maladroite avec la Corée du Nord. Disons qu'il y a là un effet de rhétorique plutôt grotesque. Pas de quoi fouetter un chat. Il m'a paru bien plus ridicule de nous resservir le énième assaisonnement citoyen pour compenser l'abandon du défilé de l'X et de la Légion étrangère.

    Et puisque l'on parle d'étranger, revenons donc au sieur Fillon, lequel, dans un de ces élans patriotiques dont la classe politique se gargarise (et ce, d'autant plus qu'elle abandonne, tous bords confondus, les principes républicains), s'est fendu d'un commentaire afin de remettre la petite Éva à sa place.  L'argumentaire du chef du gouvernement tient en deux affirmations assez lapidaires. Madame Joly méconnaît la tradition française. Elle la méconnaît d'autant plus qu'elle n'a pas derrière elle une histoire qui puisse la lui faire comprendre. Entendons plus clairement : elle est norvégienne et sa nationalité hexagonale est fraîche, trop fraîche pour qu'elle puisse comprendre l'essence de l'âme française.

    En l'espèce, il faut bien admettre que le sieur Fillon s'inspire d'une vraie tradition. Il puise dans le meilleur de la puanteur fin de siècle (le XIXe, précisons-le), de la logorrhée nationaliste et xénophobe, et à l'entendre ainsi éructer je retourne feuilleter Scènes et doctrines du nationalisme de Barrès, dans lequel je lis les lignes suivantes (alors que l'affaire Dreyfus fait rage) :

    "Qu'est-ce qu'Émile Zola ? Je le regarde à ses racines : cet homme n'est pas un Français"

    (s'adressant à Zola) : "il y a une frontière entre vous et moi. Quelle frontière ? Les Alpes"

    "Nous ne tenons pas nos idées et nos raisonnements de la nationalité que nous adoptons et quand je me ferais naturaliser Chioix en me conformant scrupuleusement aux prescriptions de la légalité chinoise, je ne cesserais pas d'élaborer des idées française et de les associer en Francais."


    Voilà qui a au moins le mérite de la clarté. Le procès de Fillon relève de la même dialectique : c'est la mise en scène d'une défense nationale devant des paroles ou des comportements qui seraient ceux de l'anti-France. Pour ce faire, il est juste de rappeler à celui (ici, à celle) qui a commis un impair sa position d'étrangère. Or, attaquer Éva Joly sur le plan d'un mépris de la chose publique française est une absurdité absolue. Car n'est-ce pas le souci de faire vivre une démocratie mise à mal par les partis au pouvoir (y compris celui auquel appartient le premier ministre) qui l'a mise au cœur des affaires qu'elle eut à traiter lorsqu'elle instruisait au sein du pôle financier du tribunal de Paris. En quoi ses origines norvégiennes la rendraient-elles moins capables de porter un jugement sur le pays dans lequel elle vit depuis si longtemps et pour lequel elle a œuvré, bien plus que tant de bons Français, dans le sens d'une remise en cause des comportements délictueux et féodaux ? Dès lors, contester sa position sur le 14 juillet est tout à fait légitime si l'on veut bien assumer sa dimension militaire, si on en revendique la nécessité, si on pose comme principe que la guerre (et la capacité de la faire) est inhérent à l'établissement ou la préservation de la démocratie. On peut moquer l'angélisme politique de madame Joly et sa vision pleine d'optimisme sur l'état du monde. Encore faut-il lui opposer une dialectique qui ne sente pas l'égout...

    Aller chercher l'argument généalogique pour discréditer une parole est une absurdité consternante. Rappelons alors au sieur Fillon que cette assimilation de l'esprit français à son inscription intemporelle dans l'espace était une des antiennes du pétainisme : "La terre ne ment pas". Faut-il ajouter que l'histoire de la résistance à l'occupant ne permettrait pas de dresser une séparation nette entre les Français et les étrangers, qu'il eut des Dupont héroïques, qu'il y en eut des couards (et pire encore), qu'il y eut des étrangers héroïques qui se firent défenseurs de mon pays sans qu'ils s'interrogeassent sur le nombre de quartiers de leur francité (et sans que ceux avec qui ils luttaient s'en inquiétassent). C'est une piètre rhétorique que de vouloir nous faire croire qu'il existe une génétique de l'esprit français. On comprend bien qu'une telle intervention prend son sens dans une recherche électoraliste visant le vivier du Front national. Triste avilissement de l'esprit que de procéder ainsi. : ce n'est pas une chasse au métèque mais cela y ressemble. D'autant plus triste que le sieur Fillon est marié à une Anglaise et il serait fort mesquin de lui demander ce qu'il pense de l'intégration intellectuelle et culturelle de son épouse. De même qu'il serait absurde de lui demander ce qu'il en est de travailler pour un homme qui est génétiquement plus Hongrois que Français. Certes, on peut ironiser mais on entre alors sur un terrain miné... Il vaut mieux le savoir.

    Il y a un an, j'avais réouvert Off-shore sur les déclarations estivales d'un ministre qui tenait des propos allant dans le même sens : une connaissance claire de "l'être-français" et une sur-détermination de l'origine. Il semble bien que ce qui pouvait à la limite passer pour un excès de langage ou une bêtise individuelle soit devenu un fonds idéologique pour la droite qui se dit encore républicaine...

     

     

  • Nils Petter Molvaer, langueur sereine

     

    À la fin de l'année dernière, j'avais mis sur le blog un extrait de ce jazzman mais le lien  "youtube" avait été rompu pour des questionds de droit. Je l'ai retrouvé hier. On dira qu'en six mois rien ne s'est passé...

    Le très bel album Khmer date de 1997 (et non 1998 comme il est indiqué sur la vidéo). Encore une perle d'ECM. Le morceau On Stream est d'une légèreté avec laquelle on a envie de s'éveiller sans avoir rien à dire (ou de regarder le soir s'installer, dans le même goût du silence). Le guitariste soliste s'appelle  Morten Mølster.






     



     

  • Filippo Lippi, lever le voile...

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    Madone à l'enfant, avec deux anges, Musée des Offices, c. 1465.

     

    Il y a dans le style, étymologiquement, une incision (1), une pression exercée, visible, faite pour capturer l'attention du spectateur (ou du lecteur). Une différence que l'on pourrait assimiler à une inégalité topographique ravissante. Les territoires vallonnés séduisent plus que les platitudes. Ainsi pensé, le style est une intempérance, une (im)pulsion. La peinture en témoigne largement. Mais nous sommes tout à coup aux Offices et c'est Filippo Lippi qui apporte la contradiction. Majestueusement, magistralement. Certes le paysage est délicat, le bras du siège de riche étoffe, le visage de la Vierge d'une beauté fraîche et paisible, avec  ce supplément d'émotion contenue qui rend Boticelli, en comparaison, si ennuyeux. Certes, l'unité chromatique et l'enchaînement des plans... Certes...

    Mais que serait notre bonheur contemporain si nous n'étions pas, imparable méandre de tissu aussi léger qu'une brume, éblouis par la coiffe. Cette coiffe affole la chevelure de Marie plus que ne le fera jamais la mise élaborée d'une courtisane. Sa blondeur italienne se nourrit de ce qui échoue à la cacher. Le voile le désigne ; il nous indique où regarder, et la complexité du chignon (?), ornée d'une gaze (mousseline, tulle...) ressemble à l'agitation paisible d'une mer. L'œil s'y perd ; l'œil s'y noie. Et comme il n'est, en peinture, qu'un ordre factice du monde, une vague plus ardente et plus aventureuse a glissé sur son cou de sable. Le voile est une écume, le corps maritime, que nous aurions envie d'alle rejoindre pour nous y rouler encore et encore. Érotique voilure de la beauté qui perdrait tant à nous contenter de sa seule nudité. Filippo Lippi s'en tient à la parade élémentaire d'un à peine invisible (2).  Telle est la bonté de son art, au delà de la maîtrise technique. Nous ne sommes plus devant le drapé qui cache et, parfois, suggère avec lourdeur, mais devant la fragile palpitation de la peau, de la courbe d'un corps, la désirable triangulation d'un cou, d'une mâchoire et d'une oreille. Fragile figure d'un désir. Sa dissimulation réhaussée par l'objet même de la dissimulation.

    Aussi discret l'artiste l'a-t-il voulu, ce voile, épanchement de la coiffure, lie la chevelure, attribut sensuel s'il en est, à cette chair, et plutôt que d'en rester à la seule contemplation des traits de la Vierge, le regard glisse en arrière. Les traits, disons-le : il y a en eux quelque chose de trop dessiné, de trop précis, qui ne résiste pas à la cartographie vaporeuse de cette zone, devenue désormais le sujet de notre fantasme. Le trait reflue, se perd ; le visage perd de sa netteté maintenant. L'œil n'en veut nullement d'être tenu à distance ; l'esprit se réjouit, d'être ainsi guidé, de s'en venir là où il n'aurait pas pensé s'aventurer. Contemplation gracieuse du cou avant de remonter sur la coiffe et les cheveux, ondulant comme les fleurs-filaments d'un monde heureusement inconnu. Un monde de plénitude où l'on oublie l'auréole de la Madone...

     

     

    (1)C'est d'ailleurs ainsi qu'en italien on désigne la gravure : incisione

    (2)Plutôt que le si facile "à peine visible". 

     

  • Un détour chez Hoffnung

    Je ne saurais en trouver la raison mais force est de constater que l'on ne rit pas en musique et que dans le domaine classique on ne trouvera guère de compositions susceptibles de provoquer une certaine hilarité. Reconnaissons toutefois que la détente des zygomatiques n'est pas en soi une obligation. À croire que le classique ait conservé de sa filiation religieuse une sévérité ou contemplative ou tragique. Il y a certes le Pumps and circumstances d'Elgar ou La Marche pour la cérémonie des Turcs de Lully pour me réjouir. Cela fait peu (je laisse de côté le Casse-Noisette de Tchaïkovsky dont les passages les plus ridicules me font franchement rire : le Russe n'avait sans doute pas l'objectif qu'il en soit ainsi). Reste alors la dimension parodique ou le pastiche, à la manière d'un Michael Nyman. Ou bien l'esprit qu'insuffla, dans les années 50, Gerard Hoffnung, lorsqu'il organisa son Festival au Royal Festival Hall de Londres. On y joua des œuvres délirantes : Grande, Grande ouverture, op. 57, de Malcolm Arnold pour 3 aspirateurs, 1 machine à cirer, 4 fusils et orchestre (dédiée au président américain Hoover), un Concerto pour tuyau d'arrosage et cordes. Musicien lui-même, Hoffnung ne considérait pas qu'il participât à une entreprise de désacralisation. Il s'agissait avant tout de jouer (avec) les œuvres. Cette attitude n'avait rien à voir avec une quelconque envie de piétiner Beethoven ou Mozart, car l'esprit en apparence potache et le goût de la dérision supposaient une connaissance indéniable des œuvres. Rien à voir avec le mépris anti-intellectuel qui règne aujourd'hui.

    C'est donc sur une note légèrement farcesque qu'Off-shore reprend ses quartiers.




  • Péril en la demeure (sur une photographie de Georges A. Bertrand)

     

    georges a. bertrand,taj mahl

     

    Agra, Taj Mahal, façade est

     

    L'homme est dans la structure. Alvéolaire. Tubulaire. Creux qu'il essaie de remplir. En suspension contre la paroi.

    Le pied, la main agrippés en pare-mort, devant/contre le vide (qui est avant tout une hauteur). Son attente peut-elle être un repos, une pause, un soupir ? Il a écroué sa condition vraie, plus dure que la pierre.

    Shâh Jahân construisit le Tahaj Mahal par amour, défait de la disparition de son épouse. Tombeau blanc de la vaine perpétuation.

    Pour l'heure, lui, le silencieux vivant, le non-compté, et dans la suspension même, ne renonce pas.