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politique - Page 19

  • Par la force des choses

     

    New Moore Island is now completely submerged under water. Global Warming experts say the land sunk because of Climate Change. It was a land that Bangladesh and India fought over for many years.

    L'anecdote est plaisante, quand on a un certain goût pour l'humour noir. Depuis 1981, l'Inde et le Bangladesh se disputaient un territoire. Rien qui soit pourtant une étendue imposante mais une île de neuf kilomètres carré environ, autant dire une misère, quand on considère notamment la superficie du sub-continent indien. L'îlot en question n'avait pas de ressources particulières. Il était là, simple enjeu. Enjeu symbolique certainement, et sa possession devait se justifier sur des considérations étayées par l'histoire, la religion ou la race (1). À l'échelle de GoogleEarth, en zoom, l'insignifiance pouvait prendre des allures de continent. C'est ainsi que naissent les guerres pichrocolines, dans le regard hypertrophié animant les esprits vindicatifs attachés à réduire le monde à leur représentation. La glose nationaliste est un terreau favorable aux imbéciles entreprises, glose sans laquelle il n'y aurait pas eu la guerre aux Malouines, les tensions hispano-marocaines pour Melilla. On a même parfois l'impression que l'ardeur des belligérants est décuplé par le ridicule du gain. Ainsi un état peut-il avoir, dans son imaginaire politique, la petitesse d'un gratte-papier pour qui gomme et taille-crayons sont plus importants que les affaires dont il a la charge. Il y a de nombreux parallèles possibles entre l'infiniment grand et l'infiniment petit, des logiques récurrentes indépendantes des principes d'échelle.

    En ce sens, le différend indo-bangladais n'est qu'un épisode de plus dans le feuilleton de l'absurde. Il a eu, néanmoins, un épilogue des plus réjouissants pour un esprit enclin à ne plus rien prendre au sérieux. New Moore, ou South Talpatti, selon le camp dont on se réclame, du fait du réchauffement climatique, a fini par sombrer. L'océan indien, sans même une révolte digne des gros titres, a englouti l'ilôt. L'inquiétude écologiste se saisira de cette catastrophe pour souligner l'urgence d'une réforme fondamentale de notre économie. Le désastre est en marche. Pressons-nous d'y trouver remède. Cela est fort juste, mais en l'espèce, d'autres indices nous ont déjà mis la puce à l'oreille.

    Regardons plutôt ce naufrage comme une métaphore nouvelle de la dérision politique. Avatar du pulvis est, de l'handful of dust : la puissance liquéfiée. Plutôt que de se vouloir penser le monde sous l'angle de son humanité (laquelle souffre, et particulièrement dans ces deux pays), l'Inde et le Bangladesh illustrent et réalisent la symbolique du pire. La puissance n'est pas dans le mieux des êtres mais dans la conservation jusqu'au boutiste de ses fantasmes. Et chacun, comme ennemis et complices, joue le jeu. Soudain l'océan s'en mêle. L'océan reprend ses droits, ce qui n'est d'ailleurs pas l'expression idéale puisque de droit il n'en a pas. Il n'est l'agent de personne ; pur acteur sans pensée, et qui triomphe de ceux pour lesquels le monde devait se soumettre. Telle est la belle ironie de cet affrontement sans vainqueur. Divertissement pascalien, propre à mobiliser les cœurs du pays, il est démasqué par un incident climatique. L'inexorable de la nature annule la dialectique politique, la relègue au rang de farce barbare. On aurait aimé voir, pendant la montée des eaux, des combattants des deux camps s'acharner à sauver ce qui ne pouvait l'être, à endiguer pour quelques jours (ou semaines) les pieds dans l'eau le si précieux témoignage de leur virilité nationale ; et les voir lentement se reitrer en invectivant l'océan silencieux.

    New Moore désormais défunte, l'Inde et le Bangladesh peuvent-ils se retourner contre le monde, la vie, les dieux, que sais-je ? Peuvent-ils sentir combien tout à coup ils sonnent creux. Sans doute trouveront-ils un autre terrain de jeu, maintenant que trente ans de bisbille pourrissent sous les eaux. Il n'y a pas à s'en faire. En la matière, les états ont d'infinies ressources. Leurs aigreurs n'ont pas besoin de grand chose. Ces deux-là ne sont qu'un exemple de circonstance, que quelques vagues ont ridiculisés. Pour l'avenir, l'horizon est chargé de bien plus funestes présages car la montée des eaux aura pour effet au Bangladesh un exode massif de population et l'épopée autour des neuf kilomètres carré désormais invisibles aura un goût bien amer.

     

    (1)J'use de ce dernier terme à dessein tant le déni scientifique de cette classification n'empêche pas qu'on voie en resurgir les miasmes déguisés sous le vocabulaire de l'ethnicité.

  • Les Nœuds dans le réseau

     

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                                                                                                                                           (Merci à Gabriel)

    La résolution n'est évidemment pas très bonne pour comprendre immédiatement de quoi il retourne. Il s'agit d'une formalisation de l'exploitation factuelle d'internet, réalisée par l'équipe d'IA (Information Architects) reprenant le schéma du métro tokyote pour essayer de définir, d'une manière efficace, le phénomène de concentration auquel lentement (mais sûrement) se soumet un instrument qui avait vocation première d'être un open space, grâce à quoi l'information et la logique circulatoire afférente permettaient d'envisager un relatif contournement des stratégies concentrationnaires (et ici l'adjectif a vocation à l'ambiguïté, dans un écho prenant sa source dans l'analyse d'un Giorgio Agamben) du pouvoir.

    Mais la formalisation d'IA met immédiatement en lumière le fait qu'internet tend vers une pseudo-liberté d'accès dont profitent avant tout des structures dont la capacité à stocker, à trier, à contrôler l'information risque de déboucher sur une maîtrise terrifiante des individus. Une mienne connaissance, aujourd'hui dans la police (eh oui), me précisait, il y a quelques années, que les renseignements de type économico-sociologiques s'avèreraient, dans l'utilisation ultérieure qui en seraient faites, bien plus redoutables que les techniques policières classiques sur lesquelles des gauchistes dépassés font une fixation : en clair, haro sur le fichier Edwige et tous sur Face de bouc. Il n'est pire aliénation que celle dont on pense qu'elle est un gain individuel (où l'on découvre alors que l'individualisme de type quasi libertarien est une vaste fumisterie. Passons.). Le contrôle ne tient plus dans le strict diktat d'une règle impérieuse et coercitive mais dans la latitude consentie et vécue comme émancipatrice au sein d'une structure qui porte en elle la trace, la traçabilité, la mémoire de ce qui ne nous appartient plus vraiment (1).


    Ainsi, ce qui devait être flux, réseaux décentrés, décentralisés se conforme-t-il, en très peu de temps, en une structure restreinte de passages obligés, inconscients qui nous mènent de réseaux sociaux (Face de bouc, Twitter, MySpace,...) en autoroutes d'informations conformes (Wikipedia, Google...) en passant par des centrales d'achat potentiels (ebay, Amazon,...), par des structures de divertissement (Youtube, Daylimotion,...), par des entreprises à vocation monopolistique (Microsoft, Apple,...). Le moule est là, invisible, indétectable pour le commun des mortels, qui trouve, d'ailleurs, que ne pas participer à une telle entreprise de connection relève ou de la ringardise, ou de la misanthropie.

    Le fait même d'avoir choisi la formalisation du métro en dit long sur le caractère passif (pour l'utilisation) du processus en marche. Il ne s'agit pas d'effacer, sous couvert d'une destination que nous aurions choisie, le cheminement par lequel l'objectif est atteint. C'est un peu comme se retrouver dans un magasin Ikea, cet endroit terrifiant où, quoi que vous veniez chercher, il n'est pas possible d'échapper à la voie tracée pour tous. Vous avez certes le droit de ne pas vous arrêter à tel ou tel rayon mais, dans le fond, même si vous semblez décidé à ne pas suivre la Loi, il en reste quelque chose : une imprégnation, du temps perdu, une lassitude. La réduction du web a des nœuds obligés (une sorte de multiplication planétaire de la station Châtelet, pour faire simple) à de quoi glacer les âmes les plus confiantes en une libération par la technologie (2). Dans cette perspective, la puissance nodale prime sur le parcours. Internet schématise donc la victoire du lieu sur l'espace, la puissance de l'appartenance sur l'errance, l'installation sur le vagabondage. La réflexion induite par la (re)construction d'IA amène à considérer la postmodernité et la révolution technique qui l'accompagne (3) sous le jour d'un asservissement volontaire, le pire qui soit puisque les premiers à le justifier sont les victimes du système mis en place. Le web a vingt ans (pour faire court) et les moyens mis en œuvre ont permis, dans un temps aussi court, de rassembler un maximum de population non pas sur un projet de vie, sur une réflexion politique, mais sur une plateforme coopérative à vocation consumériste et policière dont le dernier des imbéciles se félicitent.

    La lucidité de certains informaticiens les pousse à creuser les moyens qui ouvriraient vers une véritable alternative, un peu comme, dans le monde dont ils sont issus, est apparue une volonté de contrer Microsoft en développant des logiciels libres (du type Linux). Pour avoir eu l'occasion d'en discuter avec l'un d'eux, la partie n'est pas gagnée. Non qu'il n'y ait pas le désir de se battre contre l'hydre, mais l'inertie d'un confort consommateur, l'inconscience d'un public doucement installé de l'autre côté de l'écran, l'écrasement progressif d'une conscience politique, tous ces paramètres laissent augurer que le métro de Tokyo ainsi revisité a encore de beaux jours devant lui.

     

     

     

     

     

    (1)Sur ce point, il y aurait à développer, dans une opposition évidemment schématique, d'un symbolisme sans doute outrancier, ce que le phénomène mémoriel a perdu en autorité à mesure même que la modernité s'enfonçait dans une course contre l'entropie, pour la conservation à tout prix de ce qui était vécu et senti. L'espace et le temps contemporains sont à l'opposé absolu d'une démarche proustienne dans laquelle l'épopée individuelle admet la perte comme signe même de l'existence, la recollection comme marque de vitalité, jusque dans sa limitation. Proust, même dans le prodige d'une vie tournée vers une mémorisation aussi étendue qu'elle pût être des instants, admet implicitement que tout n'est pas dans la maîtrise. L'involontaire (pour ne dire d'une affreux barbarisme -l'involonté- fait partie de l'être : la madeleine, le pavé de Guermantes...)

    (2)Si ce n'est que l'Histoire nous a appris que la technologisation du monde, dans une forme encore très archaïque, peut féconder les régimes les plus sanglants...

    (3)Laquelle révolution pourrait s'avérer bien plus déterminante, in fine, que la chute du Mur de Berlin et l'écroulement du bloc soviétique qu'un penseur comme Emmanuel Todd avait anticipé dès le milieu des années 70, quand les Américains craignaient encore l'arrivée de ministres communistes en Occident comme une catastrophe diabolique.


  • L'effet papillon


      Salle de bain, hotel, Sofitel, New-York, hotel, Dominique, Strauss-Kahn, tentative, viol.

    Une salle de bain à New York....

     

     


     

    ... Une douche froide à Paris.

     

    Le jeu de mots est facile, le raccourci plaisant. Un peu comme une blague potache. Mais, au fond, rien qui ne soit autre chose qu'une anecdote, un barbouillage tragi-comique de turbulence pré-électorale. Rien de concret, de vivant, d'ouvert pour qui la vie n'est pas facile (selon le principe d'euphémisation généralisée de l'époque), pour les fragiles, pour ceux qui voudraient de la politique...



  • La belge démocratie...

     

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    En Belgique, le vote est obligatoire, sous peine de sanction. Le Belge croit donc en la démocratie, en l'effectivité du vote, en la capacité de l'urne électorale à faire bouger les choses. Présenter le pays ainsi, c'est tout de suite avoir envie de retourner lire Baudelaire. Le Belge est naïf ! Il faut dire qu'il n'habite pas vraiment un pays. La Belgique est historiquement une bonne blague. Cela ne rend pas les citoyens de ce royaume moins sympathiques, moins chaleureux. Ils ont en plus les meilleures bières du monde...

    Bref, le Belge est démocrate et nul ne peut se soustraire à ce diktat du vote. Du coup, un esprit facétieux, voire sarcastique, se délecte devant la situation d'outre-Quiévrain. Depuis près d'un an, ces férus du bulletin sont sans gouvernement. L'exécutif est introuvable. Faut-il s'en réjouir ? Ce n'est pas vraiment notre problème, dira-t-on. Certes, mais ce paradoxe, d'un pays où l'impératif électoral va de pair avec sa nullité pratique, ne manquera pas de piment.

    C'est qu'en effet la roue continue de tourner, le manneken-pis de pisser, Bruxellles d'accueillir le gratin de la bureaucratie européenne. Et de se demander ce qu'est alors le politique ? Non pas à la manière des Grecs, ou sur le plan d'une philosophie complète ; plus simplement s'interroger sur la détention du pouvoir. Le politique procède-t-il des mandats électifs que les élus belges semblent ne pas vouloir honorer jusqu'au bout, puisque nulle majorité ne se dégage ? Ou bien n'est-il pas, dans le fond, niché dans un appareil d'État qui fait bouillir la marmite et met de l'huile dans les rouages ? Vaste sujet, comme aurait dit le Général (oui, celui du coup d'état permanent...), lequel Général n'aimait guère la vacance du pouvoir (quoiqu'en 68, il y eut du flottement...). Il n'empêche que j'en viens à penser que la sécurité démocratique de la Belgique rend, et ce n'est pas rien, possible l'inexistence de ce qui fait l'essence de cette logique politique : un gouvernement sorti des urnes.

    À ce niveau, il devient difficile d'inciter le citoyen à se déplacer. L'exemple belge pousse à croire que des politiciens il n'est nul besoin, que c'est une engeance parasitaire et que l'essentiel, pour un pays, est d'avoir des fonctionnaires sérieux et compétents qui s'acquitteront de l'essentiel quand les histrions ministériels bafouilleront encore et encore sur des sujets dont ils ne comprennent rien. Les choix des politiques seraient-ils des formes risibles d'un aléatoire qui n'a pas grand chose à monnayer, parce que, justement, la réalité de la décision se trouve ailleurs. Étrange sentiment de voir un pays sans ligne directrice, sans discours qui le concerne (sinon les débilités séparatistes flamandes) et pourtant toujours existant, comme si de rien n'était.

    Cette fausse anarchie, produit d'un pouvoir en suspens sine die, est une des belles ironies de ce début de siècle, une histoire belge qui, pour l'heure, n'a pas eu de conséquences visibles ; mais, à la manière désabusée d'un La Fontaine, attendons la fin.


  • Vitrifier

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    Ne compte de transparence que la tienne, en ce monde, ta transparence citoyenne, sa belle impuissance. Tu es là, en ligne de mire, comme au bout d'un fusil à lunette, avec silencieux. Ils te traversent. Tu es transparent et la vérité lettre morte.

     

    Photographie : Stb'art

  • Ernesto Sabato, combatif

    Ernesto Sabato est mort il y a deux jours. Il allait avoir cent ans. Sa disparition prend donc place entre le wedding cake  d'une monarchie qui tolère les déguisements nazis d'un petit-fils et l'élimination incertaine de Ben Laden. Autant dire qu'il meurt dans la parfaite indifférence d'un monde absurde. Et sur l'absurdité violente, désastreuse de l'existence, il en savait un rayon, Ernesto Sabato. Homme de trois romans (Le Tunnel, 1948 ; Alejandra, 1961 ; L'Ange des ténèbres, 1976), économe de sa plume, quand la mode est au volume annuel, il avait compris ce que l'univers social et politique pouvait porter de destruction. En particulier, dans le dernier opus de ce triptyque, à la fois lui-même et personnage de lui-même, il était capable d'explorer comme peu l'ont fait, l'angoisse d'une écriture nécessaire qui se débat entre la connaissance des pires exactions (la torture en Argentine) et le masque d'une sociabilité capable de discourir sur les sujets les plus légers. Sabato, ce n'est pas l'éructation contre le mal (à la manière d'un Maurice G. Dantec), mais l'exploration profonde d'une interrogation sur notre place face à ce mal et à la responsabilité qui nous incombe.
    Sur ce point, lire ce papier de Juan Asensio, publié sur Stalker. Et plus que tout lire (ou relire) cet écrivain...



  • Packaging

    En ce jour de Fête du Travail, laquelle est d'ailleurs moins, historiquement parlant, la célébration du travail que la reconnaissance du droit des travailleurs, ceux-ci compris alors comme cette masse exploitée et sans illusions devant le rouleau compresseur du management et des ressources humaines, en ce jour donc qui associe la douceur printanière à l'odeur du muguet, je pense tout à coup que dans un an ce sera le Guignol's band élyséen et puisque il faut alors penser en termes de publicité, je me creuse les méninges pour, moi aussi, croire que je suis aussi intelligent et rusé que Séguéla (sauf que je n'ai pas de Rolex et qu'il me reste peu de temps avant d'avoir raté ma vie...). Je choisis le plus facile.

    Prenons cet homme, cette photo, un peu glamour, tout en séduction

     

    Dominique Strauss-Kahn

     

     

     

     

    Pensons à l'imitation d'une signature. Ce n'est pas très difficile. DSK peut se décliner en référence à ce qui suit


     

    Calvin-Klein-Logo

     

     

     

     

    Du coup, c'est l'idée d'un certain luxe qui domine et les fragrances qu'on y associe ne sont pas celles, fort convenues et prolétaires du muguet, mais celles plus complexes d'un produit design. Pensons à l'emballage. Quelque chose d'un peu brut comme ce qui suit (oui, une forme qui rappellerait qu'il va être le boss...) ferait l'affaire : sobriété, discrétion, efficacité...

    hugo-boss-hugo-1001 Parfums
     

     

     

     

    Mais si nous voulons pour la campagne confondre une affiche avec une pub, pensons à donner un nom au produit. Usons pour cela de l'idée banale : le mélange du proche et du lointain, avec la connotation du retour sur la terre-patrie, comme un sauveur. Et nous voilà comblés :

    NEW YORK # PARIS

     

     

     

     

     

    Ne reste plus qu'à trouver le slogan,  l'inscription, en bas, vers la gauche, sa force tranquille à lui. Mais sur ce point, il n'y a pas beaucoup à se creuser...

      

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

          DSK UN VRAI PARFUM DE DROITE

     

  • 6-A la lutte

    La série "À la lumière de..." reprend les photos que Georges a. Bertrand m'avait proposées pour la série "À l'aveugle". Il m'a depuis donné les indications concernant leur localisation et les conditions dans lesquelles elles ont été prises.

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    Une foule, tu ne peux pas la suivre, si tu veux la regarder et, qui sait ?, la comprendre. Il faut que tu te places face à elle, que tu la laisses venir à toi, que tu sois, toi, à contre-courant. Ce qui ne signifie nullement que tu ne puisses pas être solidaire de sa parole, y être sensible, mais comme un arbre prêt à être bousculé par elle, bouleversé et, potentiel de la lutte, emporté. Pour voir -entr'apercevoir plutôt- ces visages qui cheminent contre toi (sans que tu sois l'objet de la vindicte, bien sûr, mais seulement le pilier circonstanciel qui avère, fragile et incertain), il faut que tu acceptes d'être, étrangement, un frein, un obstacle, une interrogation (que fait-il ici ? Vient-il nous épier, comme si nous étions des bêtes indisciplinées et hagardes ?). Ce n'est rien moins qu'un acte de partage qui te laissera peut-être exsangue, mais dont il reste la force, là, sur la pellicule, quand eux et toi ne serez plus à l'endroit où vous vous êtes rencontrés, que la rue sera vide, et que les chars et les véhicules de l'ordre quadrilleront ce que ton objectif a dérobé au silence d'après.

    Photo : Camp de réfugiés palestiniens dans la banlieue de Bagdad, en 2003.
    Texte "À l'aveugle" : Versatilité


  • De l'atonie en milieu tempéré

     

     

    J'ai déjà expliqué l'an dernier l'inquiétude que m'inspire la structure Facebook comme dispositif sournois d'une société de/sous surveillance, forme moderne d'une politique de contrôle qu'avait théorisée Foucault. Ce réseau social -mais il n'est pas unique en son genre- contraint, avec une certaine finesse il faut le reconnaître, les individus (les jeunes surtout), au-delà du conformisme des pratiques qu'on y trouve, à un fichage inavoué/inavouable, prouvant au passage que les listings économiques et sociaux pouvaient s'avérer autrement plus efficace que les fichiers policiers.

    Pour l'heure, néanmoins, mettons un bémol à nos critiques. Les divers observateurs, et les témoignages directs, ont en effet souligné quelle place avait prise Facebook (entre autres, certes) dans la mobilisation populaire, aussi bien en Tunisie qu'en Egypte, dans certains pays du Golfe, et aujourd'hui au Maroc. Le réseau social a facilité les rencontres, les échanges, les rassemblements. Il a été un moyen efficace pour contrer la répression et le contrôle des individus. En permettant aussi d'ouvrir vers l'extérieur une parole étouffée, d'exfiltrer des images qui démentaient l'optimisme des pouvoirs en place, Facebook a pu aider à ces mouvements d'émancipation (dont il n'est pas ici temps d'analyser le futur. Il n'est pas certain que l'avenir soit si magnifique...).

    Cette situation et ce détournement à des fins clairement politiques d'un instrument de pacification, pour ne pas dire de neutralisation, de l'espace public, feront sans doute rêver les observateurs d'une Europe aveugle et sans souffle. L'usage purement festif qui est fait ici de ce réseau social, sa réduction en un outil de pure signalétique existentielle, en disent long sur le manque de vigueur d'une agora politique exsangue. Que Facebook ne soit que l'agenda grotesque d'une société qui compte ses amis, étale ses vacances et bavarde de néant montre à quel point l'entreprise d'acceptation d'un ordre inégal, producteur de misère et de précarité, a réussi. Peut-on imaginer qu'il soit dans l'hexagone une arme structurelle pour une révolte des laissés-pour-compte de l'ultra-libéralisme ? Ne soyons pas naïfs. Dans ce système, chacun cherche désormais son ilôt, son utopie. C'est ainsi que la futilité devient une manière d'être ou, tout du moins, une stratégie d'évitement et de préservation. Croyant que le si peu que nous ayons soit à perdre vaille le coup, nous nous plongeons sans réserve vers une sociabilité dépolitisée. Facebook, en Europe, est pour l'essentiel, un bonheur de bien-nourris (même s'ils sont pauvres...), la signature devenue universelle d'une existence normée/normale. Il est un loisir, une distraction, un divertissement pascalien. Nous ne sommes plus capables, à l'inverse de Tunisiens pour qui le joug était alors insupportable, de mobilisation. Quoique ce ne soit pas tout à fait vrai. Les apéros géants : voilà, semble-t-il, une autre manière de faire de la politique... Il faut donc croire alors que la crise est une illusion, un jeu de miroirs et que tout va très bien. Quand certains luttent, d'autres font la fête. Ce n'est pas tant le médium qui est en cause que leurs utilisateurs. Ici, il n'y a pas d'urgence. Tout va bien, très bien...

     

  • Une envie de John Ford

     

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    Marine Le Pen et John Wayne ont un point commun. Ils ont le même prénom : Marion. Trop dur pour l'une (?), pas assez viril pour l'autre (?),  il n'est pas question ici de s'interroger sur les motivations respectives qui les ont amenés à ce changement. Seule l'incongruité du rapprochement m'amuse. Et de me souvenir d'une anecdote lue je ne sais plus où d'un tournage pendant lequel le Duke montre son irascibilité ; et John Ford de mettre fin à l'incident d'un tonitruant (et sidérant pour l'autre John) : "La ferme, Marion !" (1) Il me vient alors une envie de John Ford. C'est cela : "La ferme, Marion !"

     

    (1)Je crois me souvenir que le réalisateur usa d'une formule beaucoup plus directe...